Au Sénégal, le nouveau régime incarné par le président Bassirou Diomaye Faye boucle demain mercredi 10 juillet, 100 jours de gouvernance. Zoom sur les premières initiatives et politiques économiques et financières d’un mandat.
Plusieurs contrats et conventions
Bassirou Diomaye Faye n’aura pas eu besoin de 100 jours pour remettre en cause plusieurs projets signé par son prédécesseur. L’une des décisions phares est l’annulation du contrat de l’usine de dessalement d’eau pour le pôle urbain de Lac rose signé en mars par Macky Sall.
En annonçant la semaine dernière le renoncement à ce projet, son ministre de l’Eau et de l’Assainissement, Cheikh Tidiane Dièye, a souligné qu’il allait à l’encontre des intérêts du pays. Le contrat implique la firme saoudienne Acwa Power.
D’autres contrats ou conventions sont également menacés. Ce samedi 6 juillet, le premier ministre Ousmane Sonko a annoncé la couleur, soulignant que le gouvernement a achevé l’état des lieux des secteurs minier, pétro gazier et des pêches notamment, et révélant à l’occasion que les accords ont été signés au détriment du Sénégal à 90%. Des accords qui, selon lui, seront révisés.
Une émission d’eurobonds de 750 millions de dollars à un taux décrié
Le 4 juin dernier, le Sénégal a effectué son retour sur le marché des eurobonds, après une dernière opération datant de 2021. Le pays a émis avec succès un emprunt d’un montant de 750 millions de dollars.
Ces titres ont été émis à un taux d’intérêt nominal de 7,75% l’an pour une maturité de 7 ans. Les fonds sont destinés à la couverture du déficit budgétaire qui s’élève à 840 milliards FCFA.
Si le gouvernement jubile du succès de l’opération, au sein de l’opinion publique sénégalaise, le débat a concerné le taux de 7,75% pour une maturité de 7 ans. Car en 2021, alors que le monde souffrait encore des effets de la crise sanitaire, le Sénégal avait levé 508 milliards FCFA à un taux de 5,3% sur une maturité de 16 ans.
Analysant cette opération, l’expert financier Meissa Lô a souligné que c’est la conséquence d’un mauvais endettement et de la gestion du régime précédent. Selon lui, la Côte d’Ivoire a réussi à faire une émission d’eurobonds de 2,6 milliards de dollars, soit 1 568 milliards FCFA, en janvier 2024 pour une maturité de 9 à 13 ans, à un taux d’intérêt à 6,61 %, avec un emprunt supplémentaire pour se couvrir au risque de change.
Le Sénégal a également sollicité le marché régional des Titres publics. Entre le 3 mai et le 28 juin 2024, au total, 136 milliards FCFA ont été levés.
53 milliards FCFA pour faire baisser les prix
La baisse des prix des denrées était une promesse de campagne de Bassirou Diomaye. Les efforts budgétaires et fiscaux consentis sont évalués à 53 milliards FCFA.
Ainsi, le prix du bidon d’huile de 20 litres est désormais qui coûtait 20 500 FCFA est fixé à 18 500 FCFA ( ex usine ou à l’importation). Pour le litre d’huile, il passe de 1100 à 1 000 FCFA. Quant au kilogramme de riz, il est à 410 FCFA le kilogramme, soit une baisse de 40 FCFA. Pour le sucre cristallisé, le kilogramme a connu une baisse de 50 FCFA, passant de 650 à 600 FCFA
Le sac de farine boulangère, de son côté a connu une baisse de 4 000 FCFA, passant à 15 200 FCFA. Par conséquent, pour le prix de la baguette, il passe de 175 à 150 FCFA, soit une baisse de 25 FCFA. S’agissant du ciment, le prix au distributeur est de 71 000 FCFA la tonne. Pour rappel, la taxe de 2 000 FCFA (sur le ciment) a été levée; ainsi, le sac va désormais passer à 3 550 FCFA (5,4 euros).
Début de l’exploitation pétrolière
Le Sénégal a entamé l’exploitation pétrolière le 11 juin dernier. Ce jour, Woodside et Petrosen ont annoncé l’accomplissement en toute sécurité de la production du premier baril du champ Sangomar situé au large du pays et constituant le premier projet pétrolier offshore du pays.
La phase 1 du développement de Sangomar comprend 23 puits (11 puits de production, 10 puits d’injection d’eau et 2 puits d’injection de gaz). Le forage et la complétion de 21 des 23 puits ont été effectués, dont 9 puits de production. Sangomar présente une capacité de 100 000 barils par jour.
La première cargaison commerciale est attendue dans le courant de ce mois de juillet. Les recettes pour l’année 2024 sont estimées à 45 milliards FCFA, soit 68,6 millions d’euros.
Rallonge de 20 milliards sur le budget de la campagne agricole
Le budget de la campagne agricole 2024-2025 a été fixé à 120 milliards FCFA, près de 183 millions d’euros. Il s’agit ainsi d’une hausse de 20 milliards FCFA (30,5 millions d’euros) par rapport à la précédente campagne. Ce montant a été annoncé le vendredi 4 mai par le premier ministre Ousmane Sonko en marge du conseil interministériel dédiée à la campagne agricole.
À côté de la hausse de 20 milliards FCFA, le gouvernement a également décidé de céder aux producteurs 35 000 tonnes d’engrais afin de favoriser l’augmentation des productions et de garantir la souveraineté alimentaire. D’ailleurs la distribution de ces intrants a été confiée à l’armée.
Le budget allouée à la campagne agricole connaît une tendance croissante depuis 2020. Il a évolué de 80 milliards FCFA en cinq ans. II est passé de 40 milliards FCFA à 60 milliards FCFA en 2021 puis à 80 milliards en 2022, avant d’atteindre 100 milliards FCFA en 2023.
Un démarrage »poussif » pour l’opposition
L’opposition sénégalaise est loin d’être convaincue par les 100 premiers jours du président Bassirou Diomaye Faye. L’un des responsables de parti, Bougane Guèye Dani, parle de « projet illusoire aux promesses viles » qui « cède la place à une misère accrue et généralisée ».
De son côté, l’ancien premier ministre Amadou Bâ parle de difficultés économiques qui expose les jeunes à l’émigration clandestine. » Ils sont tous animés par le désir d’une vie meilleure, fuyant la misère et les difficultés de leur quotidien. Leur périple tragique, loin d’être un cas isolé, reflète une réalité poignante : le désespoir qui pousse tant de nos concitoyens à risquer leur vie en mer « , souligne le candidat malheureux à la dernière présidentielle.