Le Sénégal subit une perte annuelle pouvant atteindre 153 millions de dollars, soit plus de 95 milliards de francs CFA, en recettes fiscales potentielles, selon un rapport publié par Natural Resource Governance Institute (NRGI). Cette perte est principalement liée aux flux financiers illicites (FFI), notamment la fausse facturation commerciale et les fausses déclarations en douane, observées dans le secteur extractif.
Des pertes fiscales alarmantes
D’après William Davis, auteur du rapport intitulé « Évitement fiscal, fraude fiscale et fausse facturation commerciale : les risques pour le secteur minier sénégalais », les FFI représentent entre 1% et 12% des recettes fiscales annuelles du Sénégal, selon les méthodes d’évaluation utilisées. Les pertes attribuables à la fausse facturation commerciale oscillent entre 57 et 153 millions de dollars, soit 1% à 3% des recettes fiscales. Une part importante de ces pertes est imputable au secteur minier.
Davis souligne que si ces montants étaient recouvrés, ils pourraient doubler les fonds alloués au programme sénégalais de transferts sociaux monétaires, un mécanisme essentiel pour soutenir les ménages vulnérables.
Faiblesses structurelles et vulnérabilités
Le rapport pointe plusieurs failles structurelles, notamment le faible nombre de fonctionnaires dédiés aux audits fiscaux. Malgré un régime fiscal jugé robuste, des insuffisances persistent dans la supervision des taxes des entreprises minières.
Par ailleurs, l’expert recommande une meilleure coordination entre la Direction générale des impôts et des domaines (DGID) et le ministère des Mines, ainsi qu’un renforcement des compétences en fiscalité pétrolière et gazière, notamment par le recrutement de géologues pour des audits spécialisés.
Les pratiques des sous-traitants en ligne de mire
Le rapport met également en lumière le rôle des sous-traitants liés aux multinationales opérant dans le secteur extractif. Ces entreprises gonflent artificiellement les coûts pour détourner des revenus, parfois grâce à des conventions fiscales avantageuses leur permettant d’échapper à l’impôt.
Recommandations pour un système plus transparent
Pour limiter ces pertes, le rapport appelle les autorités sénégalaises à :
- Renforcer l’autorité fiscale, notamment en augmentant les effectifs de la DGID ;
- Accroître la vigilance face aux conventions fiscales et aux traités bilatéraux d’investissement, qui peuvent être exploités à des fins d’évasion fiscale ;
- Améliorer la coordination entre les différents services étatiques (impôts, mines, douanes) et leurs partenaires commerciaux internationaux pour prévenir la fausse facturation.
Une opportunité pour des réformes structurelles
La publication de ce rapport s’inscrit dans un contexte où le Sénégal s’engage dans des réformes de gouvernance, avec un accent mis sur la transparence et la lutte contre la corruption. L’objectif est d’enrichir le débat public et de renforcer la gestion des ressources naturelles, clé pour le développement économique du pays.
Ce constat souligne l’urgence de mesures concrètes pour endiguer les pertes fiscales et maximiser les bénéfices des industries extractives au profit de l’économie nationale.