Le professeur Babacar Gaye, économiste et statisticien, réagit à l’annonce du Premier ministre concernant l’augmentation de 9 % du prix du kilogramme d’arachide. Cette décision, bien qu’applaudie par les cultivateurs, soulève des inquiétudes pour les huiliers locaux et interpelle sur la durabilité d’un secteur clé de l’économie sénégalaise.
Les cultivateurs en bénéficient, mais à quel prix ?
L’arachide, surnommée « l’or jaune » du Sénégal, reste un pilier pour des milliers de familles rurales. La hausse du prix représente un soulagement palpable pour les agriculteurs, souvent confrontés à des marges réduites et des conditions de vie précaires. Cette revalorisation ouvre des perspectives positives : accès à de meilleures infrastructures de santé, éducation pour les enfants et modernisation des outils agricoles.
Cependant, derrière cet optimisme, le professeur Gaye met en garde contre les répercussions potentielles sur les huiliers locaux, notamment la SONACOS, acteur historique de la filière arachidière.
Les huiliers locaux sous-pression
Avec cette augmentation, les huiliers peinent à s’approvisionner à des coûts compétitifs. Face à la concurrence des huiles importées à bas prix, notamment du Ghana, leur rentabilité est sérieusement menacée. « La situation pourrait dégénérer si les huiliers réduisent leurs achats », prévient Babacar Gaye, soulignant que cela risquerait de priver les cultivateurs d’un marché stable à long terme.
Un dilemme économique à résoudre
Cette hausse des prix met en lumière un paradoxe économique : ce qui profite aux cultivateurs à court terme pourrait déséquilibrer durablement la filière. Selon Babacar Gaye, il est urgent d’instaurer des solutions pour garantir une cohabitation harmonieuse entre les intérêts des producteurs et ceux des industriels.
Quelles pistes envisager ?
- Moderniser les huileries locales : Investir dans des technologies et infrastructures modernes pour améliorer l’efficacité de la transformation de l’arachide en huile, tout en garantissant des normes de qualité.
- Former les acteurs de la filière : Proposer des formations sur les meilleures pratiques agricoles et de gestion financière pour renforcer les compétences et la rentabilité des acteurs du secteur.
Faciliter l’accès au financement : Créer des programmes de microcrédit et des partenariats publics-privé pour soutenir les investissements nécessaires à l’amélioration des pratiques agricoles et de transformation. - Renforcer les coopératives : Encourager la formation de coopératives pour renforcer le pouvoir de négociation des producteurs et huiliers, ainsi que leur accès aux marchés.
- Promouvoir l’huile locale : Lancer des campagnes de sensibilisation et collaborer avec les restaurateurs pour promouvoir l’huile d’arachide locale, soutenant ainsi l’économie locale.
En mettant en œuvre ces modestes recommandations, l’économiste estime que « le Sénégal peut améliorer la viabilité de sa filière arachidière, tout en renforçant l’économie locale et le bien-être des communautés impliquées ».