Selon un rapport de l’IFC, 76% des entreprises africaines connectées se limitent aux téléphones mobiles et aux paiements numériques et ne profitent pas suffisamment des technologies numériques plus avancées pour exécuter des fonctions opérationnelles.
Seulement 24% des entreprises africaines ayant adopté les technologies numériques en font un usage intensif pour des tâches productives telles que la gestion administrative, la planification, les ventes et les paiements, selon un rapport publié le 16 mai dernier par la Société financière internationale (IFC), filiale de la Banque mondiale dédiée au secteur privé.
Intitulé « Digital Opportunities in African Businesses », le rapport se base sur des données représentatives au niveau national provenant plusieurs pays du continent, dont le Burkina Faso, l’Ethiopie, le Ghana, le Kenya, le Malawi, le Sénégal, l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Ouganda et la Tanzanie.
Ces données montrent que 86 % des entreprises comptant cinq salariés ou plus ont accès à une ou plusieurs technologies numériques (téléphone mobile, ordinateur ou Internet) alors que 14% ne disposent pas d’outils numériques.
Parmi ces entreprises dotées de technologies numériques, 23 % n’adoptent pas ces technologies pour des tâches productives. De plus, 39 % des entreprises adoptent les technologies numériques pour ces tâches, mais pas de manière intensive, c’est-à-dire en tant que technologie la plus fréquemment utilisée pour effectuer une tâche. Ainsi, la majorité des entreprises africaines continuent de s’appuyer régulièrement sur des méthodes manuelles.
L’adoption et l’utilisation des technologies numériques varient d’un pays à l’autre, principalement en fonction de la taille des différentes entreprises. Dans un groupe de pays à revenu intermédiaire (Ghana, Kenya et Sénégal), 57 % en moyenne des entreprises comptant cinq salariés ou plus adoptent les ordinateurs et Internet, contre 44 % de ce même type d’entreprises dans les pays à faible revenu (Burkina Faso, Ethiopie et Malawi).
Les grandes et moyennes entreprises tirent généralement davantage parti de la numérisation et sont plus répandues dans le premier groupe de pays alors que les microentreprises et les entreprises informelles sont plus présentes dans les pays à faible revenu.
Elargir l’adoption à toutes les catégories d’entreprises
Le rapport précise également que les téléphones mobiles et les paiements numériques représentent des points d’entrée importants vers la numérisation, mais ne conduisent pas nécessairement à la numérisation d’autres fonctions opérationnelles.
Jusqu’à 86 % des entreprises opérant dans les pays africains étudiés utilisent des téléphones mobiles pour leurs opérations commerciales, et 61 % ont adopté des technologies numériques avancées pour le paiement. Ce sont de loin les modes les plus courants d’utilisation du numérique par les entreprises opérant sur le continent. Cependant, ces entreprises tardent à se numériser au-delà des paiements mobiles et numériques. Près des deux tiers des entreprises qui ont adopté des systèmes de paiement numériques avancés dans la région n’ont pas encore adopté une deuxième technologie numérique avancée pour exécuter des fonctions opérationnelles.
De plus, l’adoption généralisée des paiements numériques ne se traduit pas par une utilisation intensive de ceux-ci comme méthode de paiement la plus fréquente. Seulement 7 % des entreprises qui ont adopté des méthodes de paiement numérique déclarent les utiliser de manière intensive.
Le rapport souligne d’autre part que la numérisation des entreprises peut stimuler la productivité, l’emploi et la croissance. L’arrivée de l’Internet à haut débit en Afrique a déjà entraîné des gains de productivité dans les entreprises existantes et une croissance plus forte de la production et de l’emploi. Toutefois, les progrès ultérieurs pourraient être limités si la disponibilité de l’Internet ne se traduit pas par une utilisation plus large et plus intensive des technologies numériques. En utilisant des modèles statistiques pour identifier le type d’entreprises les plus susceptibles d’adopter les technologies numériques dans les 54 pays du continent, les experts de l’IFC ont recensé plus de 600 000 entreprises formelles comptant cinq travailleurs ou plus qui présentent une forte probabilité d’adopter des technologies numériques de base ou avancées pour les fonctions opérationnelles essentielles, sur la base des caractéristiques similaires des entreprises utilisant déjà ces technologies (nombre de travailleurs, statut d’enregistrement, secteur d’activité, etc.).
Réduire les droits de douane et engager des réformes réglementaires
De même, environ 10 % des entreprises qui ont déjà adopté ces technologies ont le potentiel de les utiliser de manière plus intensive. Parmi les 230 millions de microentreprises informelles et d’entreprises en exploitation directe, jusqu’à 40 millions pourraient commencer à utiliser une forme de technologie numérique pour des fonctions telles que la comptabilité, la planification, les ventes, le marketing, la gestion des approvisionnements ou encore les paiements.
Toutefois, plusieurs obstacles freinent l’adoption des technologies numériques par les entreprises africaines. Il s’agit notamment du manque d’infrastructures numériques, du faible taux d’électrification, de l’accès limité au financement, des faibles niveaux de capital humain et des prix élevés des outils technologiques. Les équipements et logiciels numériques sont, en effet, 35 à 39 % plus chers en Afrique subsaharienne, en valeur absolue, qu’aux États-Unis, et 13 à 15 % plus chers en Afrique du Nord.
Pour améliorer l’adoption et l’utilisation des technologies numériques par les entreprises africaines, le rapport recommande notamment la réduction des droits de douane sur les biens numériques, la mobilisation de plus de financements pour les start-ups locales qui peuvent concevoir des solutions abordables pour exécuter des fonctions opérationnelles spécifiques et la mise en œuvre de réformes réglementaires visant à stimuler les investissements dans les infrastructures numériques du kilomètre intermédiaire et du dernier kilomètre, comme l’autorisation de la participation étrangère dans ce genre de projets et le soutien au partage des infrastructures.
Source : Agence Ecofin